Alinoë continuait son exploration des Terres du Kô. Bientôt, aucun lieu ne lui serait plus inconnu. Il était important qu'il connaisse le moindre recoins de ces terres si il voulait un jour être adoré. Oh, il ne doutait pas une seconde que ce jour arriverait. Ce jour ou les loups reconnaîtraient sa supériorité et le considéreraient comme le dieu qu'il est. Mais pour le moment, ils préféraient se référer au "Ko". Et cela ne plaisait pas à Alinoë.

Comment ces idiots pouvaient ils croire en l'existence de cette entité, ce flux magique. C'était tout a fait ridicule. S'il existait réellement un dieu des loups, cela ne pouvait être qu'un loup. Et Alinoë était persuadé qu'il était l'incarnation de ce pouvoir. Après tout, les âmes meurtries sont souvent promise à un destin extraordinaire, non ?

Tout en élaborant ses théories légèrement megalo, le jeune loup noir avançait sur le sentier herbeux, la tête haute et la posture fière. Une voix le sortit de ses pensées.

"Oh tais toi veux tu. J'avais la paix quand tu te taisais. Laisse moi tranquille."

Alinoë fut d'abord légèrement décontenancé. Il n'avait pourtant pas parlé tout haut, si ? Il se tourna légèrement et aperçu au loin une louve rousse couchée dans l'herbe. Elle avait l'air plutôt âgée mais pas forcément vieille non plus. Alinoë s'avança vers elle, mais elle ne semblait pas l'avoir remarqué. Mais alors, parlait elle toute seule ? Le loup noir ne pu retenir un sourire narquois. Super, il était tombée sur une folle gâteuse. Il allait s'amuser.

La louve leva les yeux, elle devait l'avoir senti ou entendu. Le loup noir continua d'avancer, l'air plus arrogant que jamais. Une fois arrivé a la hauteur de la louve, il lâcha d'un ton dégoulinant de moquerie :

"Tu me présente ton ami imaginaire ?"

La louve leva la tête, l'air plutôt exaspérée. Le sourire d'Alinoë s'agrandit encore. Il adorait ça, exaspérer les autres. La louve lui sourit à son tour et répondit d'un ton sarcastique :

"C'est compliqué. Qu'est ce qu'un beau et jeune loup comme toi fais dans les parages ?"

Alinoë serra les dents. Il n'aimait pas le ton employé par la louve. Il était clairement moqueur. Le loup noir adorait se fiche des gens, mais pas l'inverse. C'était beaucoup moins amusant. Relevant la tête dans un geste de dédain, il observa un instant la louve avant de répondre :

"Certainement la même chose que toi, la folle. Je profite du paysage en discutant avec moi même."

Il avait employé un ton railleur semblable à celui de la louve quelques secondes plus tôt. Si elle voulait jouer à qui-rira-bien-rira-le-dernier, il allait jouer aussi. Et il allait gagner.

Cette fois ci, la louve semblait plutôt amusée de la remarque. Alinoë aurait préféré qu'elle soit offusquée mais il s'amusait bien tout de même. La louve lui dit un énorme sourire avant de répondre d'un ton narquois au possible :

"Evidemment, ça tombe sous le sens, pourquoi n'y avais je pas pensé ?"

Alinoë haussa le sourcil devant cette remarque. Elle se croyait drôle, peut être ? Il s'apprêtait à répliquer après avoir poussé un léger soupir exaspéré quand il remarqua quelque chose d'étrange chez la louve. Elle semblait toute contractée, comme si elle fournissait un effort considérable, alors qu'elle était immobile. La lueur de défi dans ses yeux avait disparu, les laissant étrangement vides de sens. On aurait dit qu'elle se battait avec elle même, tant elle semblait concentrée sur l'intérieur d'elle même.
Alinoë, légèrement alarmé par cet état inquiétant lâcha involontairement :

"Euh... ça va ?"

Le petit loup s'en voulu immédiatement. Depuis quand demandait il aux autres comment ils allaient ? Il s'en fichait après tout. Tout ce qui n'était pas lui était insignifiant. Aussi, pour faire bonne mesure, il repris de son ton habituel :

"Non parce que j'ai vraiment l'impression que tu vas exploser. J'ai pas vraiment envie de nettoyer mon pelage et, sincèrement, j'ai autre chose à faire que de me baigner, tu vois."

Mais on sentait malgré tout la curiosité qui piquait dans sa voix. Alinoë remarqua autre chose chez la louve quand il la regarda dans les yeux.

Ceux ci avaient changé de couleur. La posture de la louve semblait aussi se modifier, même si elle luttait pour conserver son allure fière. Quelque peu impressionné par cette transformation, Alinoë écarquilla grand ses yeux bleus.

Spoiler:

Alinoë était confus. C'était la même louve et pourtant pas vraiment. En quelques secondes, sa posture, son allure et même ses yeux avaient changés. Il ne savait pas vraiment si c'était le fruit de son imagination, mais il lui semblait que la louve en face de lui n'était plus la même que quelques instants auparavant.

Mais il se repris vite, tout en écoutant la réponse posée et calme de la louve dont même le voix semblait avoir pris un ton différent.

"Oui, tout va bien. Excuse moi pour ce que je t'ai dis. Je m'appelle Héli... Eris. Je suis nouvelle ici."

Alinoë haussa un sourcil. Ou était donc passé le ton ironique et supérieur de la louve ? Elle n'avait pas vraiment l'air de vouloir sympathiser, quelques minutes auparavant. De plus en plus suspicieux, le petit loup noir dévisagea son interlocutrice avant de répondre, méfiant.

"Eris, hein ? Et que viens tu faire sur les Terres du Kô ? Les étrangers ne sont pas toujours les bienvenus."

Alinoë fixa un instant la louve, la transperçant de son regard bleu océan avant de reprendre d'un ton ironique, comme pour se donner bonne contenance :

"Surtout si ils n'ont pas toute leur tête."